Point Hebdo du 18/12/2023
Point hebdo du 18/12/2023 : la FED donne le coup d'envoi à des baisses de taux. A quand le passage à l'acte ?
Le président de la FED a beau avoir pris quelques précautions, voire avoir évoqué l’éventualité de relever à nouveau des taux directeurs, son message a laissé peu de place au doute : la FED s'apprête à baisser ses taux directeurs l'an prochain dans des proportions nettement plus importantes qu’envisagé jusqu’alors.
Peu importe les éléments de prudence et la réticence de la BCE ou de la BoE à évoquer le sujet de possibles baisses de leurs taux directeurs : les paroles de J. Powell et les projections des membres du FOMC (cf. graphique) ont eu le dernier mot, entrainant un nouveau rallye des marchés obligataires.
Les taux à 10 ans américains ont terminé la semaine dernière à 3,92%, à un plus bas depuis la fin juillet, après une nouvelle chute de plus de 30 points de base.
En Allemagne, le rendement du Bund est lui, retombé à, quasiment, 2%, un plus bas depuis novembre 2022.
Dans son sillage, les obligations du reste de la zone euro ont profité d’un écrasement généralisé des spreads.
En Italie, le rendement du BTP, qui flirtait avec les 5% mi-octobre, n’était plus que de 3,7% vendredi, à la faveur d’une réduction de l’écart avec l’Allemagne d’un demi-point de pourcentage, à 1,6%. Le taux de l’OAT à 10 ans, qui avait dépassait 3,50% début octobre a terminé la semaine à 2,55%.
La communication de la BCE a, malgré tout, pesé sur les actions européennes. La rigidité affichée par Mme Lagarde, qui a jugé bon de mentionner que la BCE n’avait même pas évoqué le sujet de possibles baisses de ses taux l’an prochain, a constitué une douche froide.
Si le CAC a réussi à préserver un gain hebdomadaire de 0,8% après avoir enregistré un record historique jeudi matin, à 7647 points, le DAX et le MIB affichaient un léger recul vendredi en clôture. La posture de la FED et le net repli du billet vert redonnent, sans conteste, l’avantage aux indices américains, en hausse de plus de 2,5% pour les SP500 et le Nasdaq.
Passé l’enthousiasme initial c’est, néanmoins, sur le passage à l’acte de la Fed que les observateurs se focaliseront dorénavant.
Les marchés misent depuis mercredi dernier sur une première baisse des Fed Funds en mars. Mieux vaudrait que l’économie américaine ne donne pas de signes d’amélioration pour que ces anticipations se maintiennent. Les données du mois d’octobre, négativement impactées par les grèves, ont sans aucun doute accéléré le changement de posture de la FED.
Sans doute y-a-t-il encore de bonnes raisons d’envisager une certaine instabilité sur les anticipations de la première baisse des Fed Funds...
Sans surprise, les 2 banques centrales ont maintenu inchangés leurs taux directeurs.
Comme nous l'indiquions, les surprises à attendre étaient éventuellement ailleurs, dans les projections.
Et on a été gâtés. Ou pas.
Côté FED : c'est la fête de la Colombe
Le FOMC n’a pas souhaité modérer les anticipations de baisse de taux. Au contraire.
Est-ce précipité et peu prudent ? très probablement, au vu des statistiques (croissance et emploi) très résilientes.
Les marchés ont très fortement réagi : le 10 ans américain est tombé sous 4% (près de 100bp de baisse en 1 mois et demi !), les actions s’envolent.
Si la croissance (c’est probable) et l’inflation (c’est possible) repartaient à la hausse, alors la FED aura fait un cadeau de Noël empoisonné…
Côté BCE : "patience et longueur de temps" comme disait JDLF
Le ton résolument prudent tranche avec celui de la FED.
Par exemple, il n’a jamais été discuté de baisse de taux au sein du conseil.
La croissance ralentit légèrement (prévision à 0.6% pour 2023, 0.8% pour 2024, 1.5% pour 2025 et 2026)
Les mêmes arguments sont largement répétés :
- la BCE est déterminée à ramener l’inflation à 2% (et ça, c’est pour 2025 au plus tôt)
- la politique monétaire sera restrictive aussi longtemps que nécessaire, sans que ce « longtemps » ne soit davantage défini.
- la BCE reste « data dependant » et prête à ajuster pour obtenir un retour à 2% d’inflation et à faciliter la transmission.
Seule évolution notable : ralentissement des réinvestissements du PEPP à partir du 2ème semestre, et confirmation de l’arrêt en 2025.
Résultat immédiat sur les taux : le swap EUR 2 ans reprend 10bp (3%) à et le 10 ans 12bp (à 2.61%) au moment où nous écrivons ces lignes, soit la moitié du terrain perdu après l’intervention de la FED hier soir.